26 ans et toutes mes dents : exutoire thérapeutique

Ma vie ne se résume pas à mon cancer mais c'est de ça que j'ai besoin de parler

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Rideau

Ce blog était un exutoire. A l'ouverture de ce blog, j'exprimais un besoin de parler de mon cancer. Depuis que j'ai terminé ma convalescence (il y a bientôt deux mois), je ne ressens plus ce besoin. Vous avez d'ailleurs pu constater que je n'écris quasiment plus depuis. Alors je crois qu'il est temps d'arrêter ce blog [1]. Parce que je n'ai plus besoin d'exutoire, parce que je n'ai plus "besoin" de parler de mon cancer.

Mais avant de baisser définitivement le rideau, je ne résiste pas à l'envie de faire un petit bilan.

Commençons par les raisons qui m'ont poussé à commencer ce blog. Je les exprimais ici en janvier dernier.
Oui, ce blog a rempli son rôle de thérapie : il a sûrement participé au fait que j'ai bien vécu ma maladie. Il y a évidemment plusieurs autres raisons (entourage, optimisme naturel, ...) mais ça y a contribué.
Comme prévu, ce blog a été un moyen d'informer des proches. Et des moins proches aussi :-) . J'ai été surpris par le nombre d'amis de mes parents ne me connaissant pas très bien qui ont suivi mon histoire.
Je voyais aussi ce blog comme une gravure dans le marbre, un moyen de me rappeler par où je suis passé. Je me rappelle n'avoir relu qu'une seule fois le début de mon blog. Sans doute parce que je préfère avoir une mémoire sélective et ne garder que les bons moments. Je sais que je le relirai et je sais que je re-pleurerai.
Enfin, et c'est peut-être le plus important, je me suis rendu-compte qu'au fil du temps, l'envie était de plus en plus grande de dédramatiser cette maladie qu'est le cancer. Non pas de minimiser mais de montrer qu'on peut, aussi, bien la vivre, que ce n'est pas forcément la fin du monde, qu'il peut y avoir une vie après. Il y a un an, le cancer était pour moi associé à la mort. Plus maintenant.

Plus largement, j'ai pris un grand plaisir à écrire. J'ai souvent ri en écrivant mes textes, pleuré aussi parfois. Mais à chaque fois, je me suis senti bien après avoir écrit.

En terme de statistiques, cela donne 72 articles écrits sur 10 mois (pas tous publiés), 272 commentaires, 16.000 pages visitées, 6000 visiteurs (bon d'accord, certains sont venus plusieurs fois).
L'article le plus lu ? Je vous laisse deviner... Allez, je ne vous fais pas languir plus longtemps, c'est "Libre". Un symbole ?
Le reste des statistiques n'est pas spécialement intéressant. Ah si ! 16 personnes ont tapé "générique de fort boyard" dans un moteur de recherche et sont arrivés sur mon site. Et une personne tape très régulièrement "exutoire thérapeutique" dans Google pour trouver mon site. Je ne sais pas qui c'est mais je lui fais un petit coucou :-) .

Depuis plusieurs mois, je voulais mettre ici une photo de moi. Jusqu'à maintenant, je n'avais pas trouvé l'occasion propice. La voici :

oui, c'est moi :-)

1er septembre 2006 - Crédit : 'tite soeur

Je ne pouvais pas terminer ce post sans parler de vous, lecteurs. Penser que l'on va être lu est excitant, savoir que l'on est lu est réjouissant, savoir que l'on fait rire est jouissif. J'ai aimé vos commentaires, vos mails, votre humour, votre soutien. Je vous dis donc un grand merci.




Bon.
J'arrive pas à me dire que c'est fini.
Je l'aimais bien ce p'tit blog !

Allez, tschüss !

Notes

[1] Mais je le laisse en ligne, ça peut toujours servir...


Rémission totale

Hier, j'ai vu mon chirurgien suite à l'IRM passée il y a deux semaines. Il a confirmé qu'il n'y avait plus aucune trace de cellules cancéreuses dans mon mollet. Il était satisfait de voir que j'avais retrouvé (quasiment) toute la mobilité de ma cheville et que j'arrive à me mettre (difficilement) sur la pointe du pied gauche. Il m'a autorisé à reprendre le sport. Même le ski, si je veux !

Ce matin, j'ai vu ma cancérologue. La première chose qu'elle a faite, c'est qu'elle m'a tendu une boite de chocolat. Ensuite elle m'a demandé, d'un ton très calme et avec le sourire, "de quoi vous plaignez-vous ?". J'aime bien sa façon de faire :-) . Moi, ça me met tout de suite à l'aise. Alors j'ai réfléchi et puis j'ai répondu "du prix de l'essence". Elle a regardé les IRM et le scanner, relu les conclusions de ses collègues, vu mon mollet, confirmé ce qu'on m'avait dit il y a deux semaines puis elle m'a demandé si j'avais des questions. J'en avais deux : mon site implantable (voir ici pour ceux qui ne savent pas ce que c'est) et le risque de stérilité.

Pour le site implantable, elle a dit : "on va l'enlever tout de suite". J'ai fait part de mon étonnement (j'avais entendu je ne sais où qu'on le laissait souvent deux ans, au cas où...). Elle a répondu "on va être optimiste". Ça me va ! Opération prévu le 4 décembre (ça ne fera que la 4e fois que je passe sur le billard en moins d'un an :-) ).

Pour le risque de stérilité, elle m'a dit que le processus habituel, c'était d'essayer de faire un bébé normalement, le jour où j'en ai envie, et si ça ne marche pas, on n'attendra pas pour me faire un test de stérilité compte-tenu de mon passif. J'ai dit OK sur le moment. Mais en y réfléchissant, je ne suis pas sûr que ça me convienne. Je n'ai pas prévu de faire un bébé aujourd'hui, ni la semaine prochaine, mais je crois que je préfère savoir. Je n'ai pas l'impression d'avoir peur de la stérilité. Par contre, je ne me vois pas construire une histoire sereinement avec ce doute qui continue de planer. Je vais voir si c'est possible de changer le processus habituel :-) .

Après, elle a parlé à son dictaphone. Ouais, les grands médecins, ils ont la classe, ils tapent pas leur conclusion à l'ordinateur, ils parlent à leur dictaphone. Et quelquefois même, ils donnent un nom à leur dictaphone. Celui de ma cancérologue, il s'appelle Sylvie. Même qu'à un moment, elle a dit à son dictaphone : "Sylvie, vous me prendrez un RDV pour une IRM pour Monsieur M".

Bon, comme d'habitude, j'ai pas tout compris à ce qu'elle lui a dit, à son dictaphone. Mais je me rappelle bien qu'à un moment, elle a dit : "Rémission totale".

RÉ-MI-SSION TO-TALE ! [1]

Ça fait plaisir à entendre.

Après, elle a dit IRM et consultation de contrôle dans 3 mois. Le chirurgien, lui, veut me voir dans 6 mois. Quant à mes séances de kiné, je les ai terminées cet après-midi.

Je crois que je n'aurai bientôt plus besoin d'exutoire.

Notes

[1] D'après ce que j'ai compris, on dira "guérison" seulement dans 5 ans.


Bon pour le service

Oui, je sais, ça fait longtemps que je n'ai pas donné de nouvelles[1]. Et oui, je sais, c'est pas bien :-)

Hier je suis allé passer une IRM de contrôle du mollet. Tout est OK : la tumeur a bien été complètement enlevée (exérèse totale comme ils disent, les médecins).

Aujourd'hui, j'ai passé un scanner du foie et des poumons parce qu'il arrive que l'ostéosarcome produisent des métastases à ces endroits (croissance de cellules tumorales à distance du site initialement atteint, merci Wikipedia). Là encore, tout roule, tout est ok, nickel chrome, tout ça.

C'est bizarre, mais je n'étais pas inquiet avant de passer ces examens. J'ai même failli les oublier tellement ça ne me tracassait pas. A force de passer des examens, c'est devenu un peu une formalité. Et puis au moins, quand on a passé un examen, on sait ce qu'on a, ou ce qu'on n'a pas.

Notes

[1] Quelques explications dans un billet à venir...


Libéré

Le 5 octobre 2006,

Monsieur M,

Par la présente, j'accuse réception de votre courrier reçu ce jour exprimant votre décision de mettre fin au contrat de travail nous liant depuis le 1er août 2005.

Je vous confirme notre accord pour que vous ne réalisiez pas votre préavis.

Par conséquent, vous ne ferez plus partie des effectifs de notre société à compter du 6 octobre 2006 au soir.

Cordialement,

Votre (ex)patron.

Ma décision était prise depuis plusieurs semaines, les circonstances ont fait que j'ai officialisé ma démission seulement mercredi dernier. Pour moi, cette démission a une grande signification. C'est un moyen de clore le passé. Je me sens soulagé. Ma nouvelle vie n'a pas commencé le jour où j'ai recommencé à conduire ou le dernier jour de mes traitements. Non, ma nouvelle vie commence aujourd'hui.

Edit : Suite à une discussion hier avec ma tante, je me suis rendu-compte que je ne m'étais même pas posé la question de savoir si j'avais toujours une couverture sociale en démissionnant. C'est drôle hein ! J'aime bien me faire des petites frayeurs comme ça de temps en temps ! Ça pimente le quotidien :-) . Renseignements pris, je suis couvert jusqu'au 31 décembre... 2010. Et je n'ai même pas besoin de déclarer mon changement de situation. La sécu, c'est bieeeeeeen.


Yes !

65 kg 65 kg, c'est le poids que je faisais avant ma première opération (biopsie) en janvier dernier. Avec les différentes hospitalisations et autres opérations, je suis descendu jusqu'à 58 kg.

Aujourd'hui, j'ai retrouvé mon poids initial. Bon par contre, les kilos que j'ai perdus, c'était majoritairement du muscle et ceux que j'ai gagnés, majoritairement de la graisse.

Prochain objectif : 70 kg ! Et pas avec des kilos de graisse, hein ! Allez, c'est parti : une, deux, une, deux !


Encore un nouveau mot...

Il y a deux semaines, j'ai commencé à ressentir une sensibilité désagréable au niveau du sein gauche. En palpant, j'ai senti une boule au niveau du téton. Forcément, ça a fait tilt. C'est comme ça aussi que ça avait commencé pour mon mollet. J'ai d'abord décidé de ne pas me prendre la tête : "on verra bien dans quelques jours, ça aura sûrement disparu".

Lundi dernier, la boule était toujours là. Pas plus grosse que les jours précédents mais plus précise. Alors oui, j'ai douté. Oui, j'ai pleuré. Et si ça recommençait alors que je croyais que tout était terminé ? Mélange d'incrédulité, de révolte et de détresse...

J'ai donc appelé mon médecin traitant qui comprenant l'urgence me trouva un rendez-vous pour le lendemain malgré son emploi du temps surchargé. Une fois chez le médecin, j'ai décrit les symptomes il a palpé et son verdict fut rassurant : développement hormonal.

Ben oui, mes hormones n'ont rien foutu pendant plus de 4 mois alors maintenant elles se lachent ! Mon torse n'a plus rien à envier à celui de Demis Roussos, je mets sa branlée à Schwarzy au bras de fer et ma glande mammaire se développe (oui seulement une, la gauche). Bon d'accord, le développement de la glande mammaire, c'est plutôt chez les filles, mais ça arrive aussi (rarement) chez les mecs. Et puis en terme de rareté, je suis un spécialiste, non ?

Aujourd'hui, j'ai fait une échographie pour être complètement sûr et l'interprétation de mon médecin a été confirmée. Ouf.

Ceci m'amène à l'analyse suivante : une des raisons pour laquelle je vis bien mon cancer (j'écris au présent parce que les conséquences sont toujours d'actualité), c'est que je l'ai accepté. Je ne suis pas révolté. Ni contre lui, ni contre moi. Mais dès que quelque chose arrive en plus (suspicion de phlébite il y a quelques mois, boule au niveau du téton cette fois-ci), la révolte gronde, le vase déborde, la sérénité vascille.

Pourtant, je sais qu'il peut m'arriver autre chose. En lien avec mon cancer du mollet ou non. Sans doute que si ça arrivait, j'achèterais un vase plus grand où on pourrait mettre plus de gouttes. Ainsi, ça ne déborderait pas. Mais pour l'instant, je ne l'ai pas, ce grand vase. Alors de temps en temps, ça déborde un peu. Mais jamais longtemps. Je fais alors en sorte de vider un peu le vase, et tout rentre dans l'ordre : la sérénité repointe rapidement le bout de son nez.

Ah oui, j'oubliais ! Le nouveau mot ! "Gynécomastie unilatérale gauche discrète". C'est ce que j'ai au téton gauche. Par contre, si vous aviez la mauvaise idée d'aller voir notre ami Google, sachez que dans mon cas, rien ne se voit de l'extérieur. Manquerait plus que je devienne une gonzesse !


Transition

Le 20 février dernier, je débutais mon traitement contre mon cancer.
6 cures de chimio, une opération chirurgicale et 31 séances de radiothérapie plus tard, j'ai terminé mon traitement aujourd'hui, 20 septembre.
7 mois de traitement, c'est long. 7 mois d'une vie, c'est court.

Tout n'est pas terminé pour autant. Je continue les séances de rééducation avec le kiné et les premiers examens de contrôle vont bientôt arriver (fin octobre). Et puis il y a le retour à la "vie normale"...

Suivre un traitement, c'est facile. Je vous entends déjà vous exclamer : "Oh là, non, non, non ! C'est pas vrai, c'est pas facile pour tout le monde !". Je persiste : "suivre" un traitement, c'est facile. Le supporter, c'est autre chose. C'est facile parce qu'il n'y a pas de choix à faire. Des médecins décident du traitement, le patient approuve, des infirmières appliquent. Et zou !

Avoir le statut de malade a été facile pour moi. J'étais dans un cocon. Ma mère était là pour répondre à toutes mes requêtes quasiment 24h/24. Mon père et mes soeurs : pareil, dès qu'ils étaient présents. Mes amis sont venus me voir, m'ont transporté, m'ont téléphoné, m'ont envoyé des mails, sont passés me voir à l'hopital et chez mes parents. A chaque fois, ma maladie et moi étions les centres d'intérêt. J'ai été choyé.

C'était facile.

Et maintenant ?
Maintenant, je vais retrouver mon appartement, la vie en colocation et mon travail. Je vais bientôt reprendre le sport (natation) et tous les autres loisirs. Joie !

Et puis il va falloir faire des choix.
Prendre son temps ou foncer ?
Choisir ce que je veux faire de ma (nouvelle) vie.
Choisir ce que je veux faire de moi.
Découvrir, avancer, construire.

Ça, c'est moins facile. Mais je vais le faire.


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